Les manifs des semaines passées m’ont rappelé d’autres manifs qui avaient un tout autre objet.
Il y a quelques années, j’étais descendu dans la rue, comme on dit, pour protester contre un projet de loi visant à prolonger l’âge de la retraite.
C’était, je crois, sous le règne de Chirac ou peut-être de Sarkozy.
On parle toujours, épisodiquement, de reculer l’âge légal de départ à la retraite mais, si l’on entend encore ici ou à quelques récriminations, plus personne ne manifeste en masse contre ces projets.
C’est un vaste problème car enfin il faut bien admettre que l’espérance de vie augmente considérablement et que les retraités sont de plus en plus nombreux.
Mais tout le monde n’arrive pas au seuil de la vieillesse dans le même état de conservation.
Les bureaucrates qui n’ont effectué d’efforts physiques que dans le cadre de leur salle de gymnastique arrivent certainement à la retraite en meilleurs état qu’un maçon, un ouvrier de chantier ou un manutentionnaire qui ont eu à se coltiner de lourdes charges tout au long de leur vie professionnelle.
Les moyens financiers sont aussi bien différents puisque les plus modestes ont le plus grand mal à vivre de leur retraite alors que des gens qui ont déjà bénéficié d’un salaire confortable pendant leur vie active peuvent se payer, au soir de leur vie, des voyages agréables et des séjours couteux dans des endroits paradisiaques.
Ne parlons pas des « retraites chapeau » des grands dirigeants d’entreprises et de celles hyper confortables des présidents, ministres, députés et autres sénateurs qui assurent à leurs bénéficiaires une vieillesse dorée
Mais la retraite peut-elle être, pour autant, le but suprême de l’existence ?
J’ai un peu de mal à comprendre certains jeunes qui, à peine viennent-ils de commencer une carrière, pensent déjà à préparer leur retraite.
Car, avant d’atteindre l’âge de la retraite, il faut vivre et c’est cela qui est important.
Vivre, c’est-à-dire avoir, en dehors d’une vie personnelle et intime, une profession, un métier motivant, source de satisfaction.
Beaucoup de nos jeunes n’auront jamais un métier motivant, beaucoup n’auront jamais de métier du tout et je pense que c’est un problème majeur de notre société.
Car comment se réaliser quand on est confronté à un chômage chronique et quand on n’a pas eu accès à une formation qui débouche sur un vrai emploi.
Je pense qu’on peut être très satisfait de sa vie en étant charpentier, chauffeur routier, mécanicien ou menuisier, autant qu’en étant chercheur au CNRS, médecin, avocat ou banquier ( ?), mais les caisses de retraites savent faire la différence.
Il faut savoir aussi qu’être retraité c’est être écarté du monde actif.
Tu sais, cher confident, que j’ai pratiqué, tout au long de mon existence, des métiers très variés mais j’ai eu une énorme chance, c’est que la plupart d’entre eux, même si ce n’était pas toujours des métiers prestigieux, m’ont apporté d’énormes satisfactions.
C’est pourquoi, sans doute, je n’ai jamais songé à la retraite.
C’est bien évidemment ce parcours chaotique qui est la cause que je me retrouve aujourd’hui avec ce qu’on appelle pudiquement, une retraite « modeste ».
Mais je ne regrette rien ou plutôt si, je regrette de ne plus être en activité car la vie est active et la retraite n’est, pour moi, qu’une mise sur la touche, comme disent les sportifs.
Allons, on ne peut pas être et avoir été.
Mais, depuis que je suis vraiment à la retraite, je me sens dans la peau d’un vieux con inutile.